Le « pied qui tourne » à l’âge de la marche est un problème fréquent de consultation. Cela concernerait entre 16 et 30 % des enfants d’âge scolaire. Il s’agit le plus souvent d’un trouble de torsion des os longs, bénin et sans conséquence, mais source d’inquiétude pour les parents. Le Dr Tristan Langlois qui présentait ce sujet aux 25èmes rencontres de Pédiatrie Pratique rappelait toutefois que, malgré cette bénignité, l’examen clinique doit être soigneux car il peut parfois révéler une anomalie jusqu’alors non connue.

Rechercher les antécédents familiaux de troubles de torsion

L’origine des troubles de la marche est multifactorielle. La cause peut être musculaire, neurologique ou héréditaire. Le trouble est évolutif, mais cette évolution est variable. Le praticien se doit de rassurer les parents et les inciter à la patience. Le trouble de la marche est un mécanisme compensateur.

L’interrogatoire doit revenir sur les conditions de la naissance, rechercher des facteurs de risque de luxation congénitale de la hanche, s’enquérir d’un éventuel retard des acquisitions et d’antécédents familiaux (se souvenir du caractère familial des troubles de torsion) et du retentissement dans la vie courante (chutes, douleurs).

L’antétorsion fémorale est le trouble le plus fréquent

L’examen, d’abord dynamique, consiste à déterminer la démarche (pieds en dedans, pieds en dehors, rotules) et élimine une pathologie du pied en recherchant une boiterie, une marche sur la pointe des pieds, ou un metatarsus adductus. L’enfant est ensuite examiné debout, pieds joints, puis en décubitus ventral pour mesurer les rotations de hanche, l’angle de torsion fémorale et de torsion tibiale. Enfin, l’examen se termine par la recherche d’un déficit neurologique ou musculaire.
Le plus souvent il s’agira donc d’un trouble isolé bénin, ne nécessitant pas de consultation spécialisée. L’antétorsion fémorale est de loin le trouble le plus fréquent, dans 30 % des cas entre 4 et 7 ans et se traduit par les pieds et rotules « en dedans ». La torsion tibiale externe insuffisante est retrouvée dans 10 % des cas, entre 18 mois et 10 ans et se manifeste schématiquement par les pieds en dedans et rotules en face. Enfin, les pieds « en dehors » traduisent une rétrotorsion fémorale excessive, une torsion tibiale externe excessive, ou une triple déformation.

Bien que souvent bénin, il ne faut pas négliger ses diagnostics différentiels

Mais le trouble de torsion peut aussi être associé à un signe d’alerte nécessitant une consultation spécialisée. Il peut s’agir d’un retard des acquisitions, de chutes quotidiennes chez l’enfant de plus de 8 ans, d’un trouble de la démarche unilatéral, d’une asymétrie, boiterie, douleur, anomalie du pied, anomalie à l’examen neurologique. Car la bénignité de la majorité des cas ne doit pas faire méconnaître les diagnostics différentiels. Le pied en dedans peut être dû à une anomalie morphologique du pied ou à une paralysie cérébrale (retard des acquisitions, atteinte unilatérale). Le pied en dehors peut être la conséquence d’une épiphysiolyse fémorale, chez l’adolescent ou le pré-adolescent.
En présence d’un signe d’alerte, il est nécessaire d’adresser l’enfant à un orthopédiste. Sinon, il faut rassurer les parents quant à la bénignité du trouble et sa tendance à se corriger avec la croissance. Le Dr T. Langlois recommande de leur délivrer une fiche d’information, comme celle éditée par la SoFOP (Société Française d’Orthopédie Pédiatrique).
Il rappelle enfin que les orthèses ne sont pas recommandées et que la chirurgie est exceptionnelle, après l’âge de 10 ans et seulement dans les formes très sévères.

Dr Roseline Péluchon

RÉFÉRENCES

Les pieds qui tournent à l’âge de la marche : que faire ? – Dr Tristan Langlois –
25èmes rencontres de Pédiatrie Pratique. Du 22 au 23 janvier 2021 (virtuel)